Pourquoi?

30 Juil 2005


Benoît : En dévalant les rapides et en traversant d’immenses lacs que l’on peut comparer à ceux que l’on retrouve sur le fleuve Saint-Laurent, nous avons beaucoup de temps pour réfléchir. Même si pendant 6 à 7 heures par jour votre partenaire de canot se situe à moins de 6 pieds de vous, vous n’êtes pas constamment à lui parler. Vous ressassez plein de choses dans votre tête. Vous pensez souvent aux êtres aimés qui vous manquent beaucoup. C’est à ce moment que les personnes que vous teniez pour acquises ne nourrissent plus votre âme. Vous êtes en sevrage. Je me suis rappelé ce qui avait été l’élément déclencheur de cette expédition. Après réflexion, 3 événements avaient été déterminants pour que cette aventure prenne forme. Le premier événement eut lieu au milieu des années 90. J’étais au magasin La Cordée et je fouillais dans les cartes de rivières à la recherche de ma prochaine descente. Je feuilletais la carte de la rivière Moisie dont j’avais entendu beaucoup de bien. Derrière moi une voix me dit: « Non, pas cette carte. Si tu veux une belle rivière, prends la carte de la George ». Cette voix, c’était celle de Jean- Marc Chabot, grand canoteur devant l’éternel, qui avait descendu la George en 1992, avec un ami, chacun dans un canot solo. J’ai alors acheté la carte de la George, l’ai regardée et placée dans mon classeur de cartes, en me disant qu’un jour, je me la paierai.

Le deuxième événement se passa en mars 2004, sur un train de VIA, en revenant de Québec. J’aperçus un homme avec une casquette sur laquelle était inscrite quelque chose comme « Cycle for Autism. Help solve the puzzle ». Je pris en note ces quelques mots et dès mon arrivée à la maison, j’essayai de trouver des informations sur ce mystérieux slogan sur le Web. Si ma mémoire est bonne, il s’agissait de 2 pères d’enfants autistes, adeptes de vélo de route, qui avaient décidé de traverser le Canada à vélo, afin d’amasser des fonds pour la recherche sur l’autisme. Grâce à un site Web très bien fait et à l’appui des différentes organisations locales de soutien à l’autisme, ils avaient réussi à générer plus de 1 million de dollars pour la recherche. Je trouvais l’idée inspirante et grandiose.

Le décor idéal pour combattre le spleen

Le troisième élément déterminant a été la lecture d’un livre que j’ai déniché sur Internet. Il s’agit de l’histoire de Leonidas Hubbard, un jeune journaliste de New York, qui a tenté en 1903 avec l’aide de 2 autres personnes, un avocat et un indien métis du nord de l’Ontario, de trouver la route qui menait à la rivière George, à partir de Goose Bay au Labrador. Malheureusement, une suite d’erreurs l’entraîna sur de mauvaises rivières et il mourut de faim, en octobre 1903, dans une cabane de trappeur. On retrouva son journal de bord où il décrivait jour après jour sa déchéance et la mort qui le guettait. Les 2 autres eurent la vie sauve. Avec l’aide du même indien métis, la veuve de Hubbard, Mina, sans expérience elle aussi, organisa dès 1905 une autre expédition afin de retrouver la route d’eau qui la mènerait à la George. L’avocat de New York, évincé de l’expédition de Mina Hubbard, organisa sa propre expédition. Les 2 expéditions se déroulèrent simultanément. Le livre en question raconte l’expédition de Leonidas Hubbard, celle de Mina Hubbard et l’autre de l’avocat. Tous les lacs de tête de la George portent encore les noms que ces gens leur ont donnés à l’époque : « Lac de l’espoir » (Hope Lake), nom donné au moment où il croyait avoir trouvé la route, « Lac Résolution » lac où Mina décida de continuer plutôt que de rebrousser chemin, malgré l’hiver qui approchait…

Après la lecture de ce livre, ma décision était prise. Je descendrais cette rivière. Après réflexion et consultations, la réalisation de cette expédition deviendrait une façon de mieux faire connaître « Les Répits de Gaby » pour enfants autistes que nous avons mis sur pied, il y a plusieurs années. La descente deviendrait le fer de lance d’une collecte de fonds pour enfin doter les RDG d’une résidence propre. Après discussion avec les membres du conseil d’administration et des parents d’enfants autistes, l’idée était retenue. Un an de travail a finalement permis à ce périple de se concrétiser. Le prochain rêve à réaliser sera la résidence pour la quarantaine d’enfants autistes que nous desservons. Et, dans ce rêve, il n’y a pas de mouches noires.

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