Benoît : Enfin, c’est fait ! Nous avons finalement goûté aux fameux rapides de la rivière George. Après un an de préparation, de réunions, de planification, de lecture de récits, de grilles d’équipement, de menus, de courriels, de budget… nous avons dévalé ces légendaires rapides du Nouveau-Québec. Nous avions planifié une journée de repos aujourd’hui, mais le site où nous avons campé hier était loin d’être à la hauteur. Nous aurions préféré descendre les 5 derniers kilomètres, essentiellement des rapides de niveau 2 et 3, pour coucher dans un des nombreux bâtiments que possède Norpaq sur la George. On nous avait même mentionné que quelqu’un y serait et nous accueillerait. Mais ce n’était pas prudent. Nous avions pagayé nos 18 kilomètres prévus face à un vent franc nord. Il était tard, nous étions vannés et il était mieux d’attendre au lendemain. Malgré le niveau d’eau plutôt bas cette année, les vagues étaient effectivement impressionnantes. Tout autant que les paysages. Tellement que nous avons peu de temps pour les admirer. Spécialement une paroi rocheuse longue de 5 km, parsemée de neige, illuminée par un soleil qui perce des nuages gonflés de pluie. Ici le ciel nous semble plus large et plus haut que chez nous. Il semble s’éterniser. Arrêt vers 17 h 30 à un site entouré de montagnes dégarnies. Une jeune caribou solitaire nous regarde de la rive et s’avance pour satisfaire sa curiosité. Étienne s’arrête sur la rive pour l’approcher. Quand ce canoteur baraqué se lève, elle prend peur et quitte sans demander son reste. Une biche qu’il n’aura pas su séduire… Ayant manqué le trek en montagne de la dernière journée de pause, je me promets demain de faire le sommet qui surplombe cette vallée glaciaire. Ayant peu d’expérience dans ce type de randonnée, Raymond est partant pour m’accompagner.
Raymond : Journée fertile en émotions mais qui ne sera sûrement pas la dernière. J’avais un peu le trac à l’idée d’affronter les premiers rapides. Comment réagirait le canot avec tout son matériel à bord et comment moi, je réagirais devant ces rapides à fort débit. Il y avait une part d’inconnu, et c’est ce qui rend l’aventure si intéressante. J’oserais une analogie : la descente d’une rivière est comparable à une représentation théâtrale. La pièce débute lorsque nous mettons les canots à l’eau. Pendant que nous traversons les sections calmes de la rivière, je suis comme l’acteur en coulisse. À l’approche des rapides, j’entre en scène. Au moment d’attaquer les rapides, je donne la réplique à mon coéquipier. L’adrénaline et la concentration sont à leur comble. Même si je ne le vois pas de face, il me faut être attentif à ses moindres réactions. Être à l’écoute de ses instructions puisqu’il est celui qui aperçoit les obstacles en premier. Les yeux fixés sur la rivière, nous ne nous rendons pas compte de la vitesse à laquelle nous la dévalons. Nous n’avons pas de point de repère, sinon lorsque nous apercevons le fond de la rivière, qui est d’une grande limpidité, ou encore pendant un bref instant où nous jetons un regard sur la rive. Il est 22 h 30. Mes collègues jouent au poker et moi je vous laisse. Mes samedis soirs ont déjà pris fin plus tard… Mais demain, journée de repos. Questions ? Notre expédition ou nos textes suscitent des questions ou commentaires ? Posez-les nous, en moins de 50 mots si possible (technologie oblige) à l’adresse de courriel pagayerpourlautisme@vdl2.ca. Nous essayerons de répondre à une question par jour.
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