Benoît : Je vous écris exceptionnellement en matinée plutôt qu’en fin de journée. Notre plage que nous croyions idyllique se révèle moins séduisante ce matin. Je suis prostré dans ma tente et tape avec le lap top posé sur ma valise Pélican, entre mes deux jambes. Notre journée a commencé à 0 h 36 ce matin. Des vents violents pliaient notre tente de façon disons inquiétante. Raymond et moi avons vidé les deux vestibules pour nous assurer que rien ne s’envole. Le bruit du vent sur la tente était assez assourdissant pour que nous ayons à crier pour nous entendre. Avant de nous coucher, malgré le calme, nous avions pris soin de défaire les poteaux de coin de la tente moustiquaire et d’y déposer les bagages les plus lourds. Grâce à Internet, nous savions que la journée du lendemain serait épique et espérions que notre équipement puisse tenir le coup (voir la météo de Kangiqsualujjuaq ).
Ce matin nous étions debout à 6 h 30 afin d’être sur la rivière assez tôt. En sortant de la tente, la température était de 9 degrés et le vent avait tourné plein nord. Il souffle de façon constante à près de 40 km/h. Sous-vêtements en polar, veste, coupe-vent, gants, cache-cou et tuque sont de mise. Finalement la vraie température du Nunavik ! Avec un vent pareil, aucune chance de pagayer aujourd’hui, ni de ravitailler nos voisins par hydravion. Après un copieux déjeuner de musli, nous nous dirigeons vers nos voisins américains pour leur offrir notre aide ou de la nourriture. Peter a les yeux cernés et Alana est affairée avec une jeune. Il me raconte que leur nuit a été fort occupée avec deux tentes détruites, des canots qui ont roulé sur la plage comme des fétus de paille et une adolescente qui a eu une crise inexpliquée, qu’ils ont dû traiter avec une seringue « épipen ». Ils attendent des nouvelles du pilote de l’hydravion parce qu’ils doivent évacuer la jeune fille, accompagnée d’une animatrice et de tout leur équipement. Peter m’avoue qu’ils ont eu très peur après les premiers symptômes (problèmes respiratoires, vomissements, maux de ventre, lèvres enflées et décolorées).
En écrivant ces lignes (11 h 30) j’entends le bruit d’un avion qui s’approche. À la suite de la lecture des nombreux récits de descentes de la George disponibles sur Internet, nous savions que les vents pouvaient être assez violents et nous garder dans notre tente pendant plusieurs jours. Citation optimiste : « Le bon côté à tout ça est que pour la première fois nous pouvons nous balader sans protection contre les mouches ». J’ai une pensée toute spéciale pour mon fils Antoine, qui célébrera demain, le 21 juillet, ses 16 ans. Il a toujours été l’ange gardien de notre fille Gabrielle et sans son soutien constant, elle n’aurait sûrement pas fait la moitié des progrès qu’elle a accomplis ces dernières années, malgré son autisme. Gabrielle et Antoine ont seulement 18 mois de différence.
{ 0 comments… add one now }